Poèmes inédits de Marianne Dubois

Le Jardin du rire

Une graine a germé dans mes jardins. Une plante est née qui fleurit dans un rire. Elle me susurre à l’oreille : Ecrire - Ecrire - Ecrire.

Ecrire quoi ? N’ai-je pas déjà tout dit, tout écrit, moi ou d’autres, ce qui revient strictement au même ? Les tendances pléthoriques de cette activité ne me semblent même plus personnelles.

Mais voilà, il y a une réponse :
- Un grand rire.
- Ecrire le rire ?
- Pas de mots pour écrire le rire, et pourtant les mots s’alignent déjà et caressent la feuille blanche. L’écriture est là, pleine de rires. Elle n’a d’autre destination que de subsister pour elle-même, pour la joie et pour suivre ces cours d’eau qui portent le rire. Ruisseaux de montagne qui chantent malicieusement sur les galets ou rivières majestueuses qui s’étendent en sons graves de cloches triomphantes.

Ecrire le rire ? Cela ne veut rien dire. Il s’égraine de lui-même sans aucune aide, juste pour le plaisir, juste pour exister, se répondre, se perdre et se récréer, il ne demande rien, même pas une motivation. Il est comme Dieu, il s’autogénère, se multiplie, danse la gigue, reprend sa respiration et repart dans un nouveau tourbillon.

Il mange les tabous, il asticote, chatouille et grignote les conventions, les règles, les lois et les traditions.

Aussi léger que la liberté, il transforme et ba1aye la misère, les conflits et la désolation.

Mais quel secret cache-t-il donc ? Comment s’y prend-il pour transmuter ce qu’il emporte au creux de ses ailes?

C’est très simple : d’abord il s’amuse pour rien, juste pour rire. La joie sans attente qu’il propage, est un dissolvant pour les conserves accumulées dans nos têtes. il nous délivre de nous-mêmes et nous montre l’absurdité de nos grimaces et de nos gesticulations. Il crée la distance qui change la vision et ignore le poids de la séparation.

Quelle merveilleuse nouvelle, le rire pourrait-il devenir notre nouveau maître?

Comme toute chose rencontrée par le coeur lorsqu’il s’allège, un éclat de rire, pourrait-il être le choix de nos rêves ?

Je vous laisse, lecteur, la liberté de le choisir ou d’en rire…